Hommage à Halldór Laxness
Halldór Laxness, lauréat du prix Nobel de littérature en 1955, est un écrivain remarquable qui a su parler de son temps tout en retrouvant l’esprit et la forme du genre narratif islandais. Ceux qui aiment le genre un peu sec des sagas liront donc avec beaucoup de plaisir La Saga des Fiers-à-Bras ou La Cloche d’Islande, deux des chefs-d’œuvre de Laxness (qui présentent l’avantage d’être traduits en français…).
La Cloche d’Islande, longue trilogie centrée sur trois personnages bien différents, aborde les thèmes de l’indépendance perdue, de l’honneur, de la mémoire du peuple islandais qui, depuis le Moyen-Âge, écrit et récite les œuvres du passé. La trame du récit est essentiellement juridique, et l’action avance au fur et à mesure des procès et des actions en appel. Pas de place à l’analyse psychologique. C’est aux actes que l’on peut deviner le sentiment des personnages, mais cela n’a guère d’importance dans une société où tout, y compris l’amour, est affaire de contrat. L’essentiel, c’est de garder les apparences : pas vu, pas pris.
On retrouve cette sécheresse dans la moindre phrase. Laxness prend plaisir à emmener le lecteur sur une piste puis, d’une manière très sarcastique, à le décevoir ou à le surprendre au dernier mot.
Halldór Laxness est décédé il y a dix ans. Il est un modèle pour les Islandais, peuple peu nombreux qui a pourtant une grande vitalité littéraire (les Français devraient peut-être regarder de ce côté). Mais c’est un modèle souvent perçu comme trop grand, trop impressionnant par les écrivains islandais d’aujourd’hui. Je suis curieuse de voir qui va oser prendre la relève.